Formé au Stade Malherbe de Caen, Herman Moussaki s’épanouit aujourd’hui au Luxembourg. Avec le F91 Dudelange, actuel leader du championnat, il peut espérer disputer la Ligue des Champions.
« Bonjour Herman, peux-tu nous parler de ton parcours ?
Je suis né à Brazzaville [en République du Congo, ndlr] et je suis arrivé très jeune en France, accompagné de ma mère et de mon grand frère. J’ai commencé le football à l’âge de 7 ans à Évry, où je suis resté jusqu’en U13 et où on m’a appris les très bonnes bases du football.
Après ça, je rejoins le club de Brétigny sur Orge, qui est alors la meilleure équipe de jeune du 91. J’y reste jusqu’en U17 deuxième année, puis je suis repéré et signé au centre de formation du Stade Malherbe de Caen.
En mars 2019, tu participes à un stage de préparation avec les U23 du Congo. Qu’est-ce que représenter ton pays signifie pour toi ? Est-ce que ça fait aujourd’hui partie de tes plans d’avenir ?
Ça a été un très bon moment durant lequel j’ai pris beaucoup de plaisir. Mais ça a surtout été un honneur de pouvoir porter les couleurs de mon pays, de ma patrie.
C’est l’un de mes buts sportifs. Chaque joueur souhaite pouvoir représenter son pays et j’espère pouvoir le faire au plus haut niveau.
À cette même période, tu connais tes premières minutes en Ligue 1, en entrant en jeu dans une rencontre face à Angers. Qu’est-ce que tu ressens à ce moment-là ?
Avec du recul, je me rends compte que j’étais insouciant, je ne me rendais pas encore compte de ce que j’étais en train de vivre. J’étais un gosse qui avait la chance de réaliser son rêve. Je voulais donner le maximum, montrer que j’avais faim et essayer de marquer les esprits.
En octobre 2020, tu es prêté à Boulogne, en National. Que ressors-tu de cette expérience ?
Elle m’a beaucoup apporté. À Boulogne, j’ai eu plus de responsabilités que j’en avais à Caen. J’ai aussi plus joué. Ça s’est mal terminé avec la descente du club, mais ça n’enlève en rien tout le plaisir que j’ai pu prendre avec celui-ci.
« Partir à l’étranger te permet aussi d’acquérir de l’expérience et, possiblement, de marquer les clubs par lesquels tu passes. »
Dans une interview réalisée en avril 2021, tu soulignais l’importance de la confiance que t’avais accordé le club boulonnais. Quelle place donnes-tu au travail d’un staff dans la préparation psychologique d’un joueur comme toi ?
C’est très important ! Pour moi, ça représente quasiment la moitié du travail d’un joueur. Un joueur qui sait que son club et son coach comptent sur lui, même après de mauvaises performances, c’est un joueur qui est libéré sur le terrain.
Tu peux plus te concentrer sur le terrain, tu te sens plus concerné et tu as l’envie de te donner à 100%. Personnellement c’est quelque chose que j’ai beaucoup plus ressenti à Boulogne qu’au Stade Malherbe. J’y étais vraiment épanoui.
En août dernier, tu rejoins le Luxembourg et le club de Dudelange. Pourquoi ce choix ?
Encore une question de confiance. J’ai senti que le coach me connaissait bien, il savait ce qu’il voulait faire de et avec moi.
Au-delà de ça, j’ai eu l’opportunité de visiter, à plusieurs reprises, leurs installations, c’est ce qui a fini de me convaincre.
Dudelange a pour projet de remporter le championnat et la Coupe du Luxembourg tous les ans. Cet été, le club a raté de peu la qualification en Conférence League. C’est intéressant pour les joueurs de pouvoir se projeter à jouer un barrage de Ligue des Champions, d’Europa League ou, comme ce fût le cas, de Conférence League.
On forme une très belle équipe, un beau groupe. Nous sommes formés à l’éventualité de jouer l’Europe. Le coach nous parle constamment de red line, de toujours se donner à fond. Il nous inculque une mentalité de vainqueur.
Le championnat du Luxembourg est méconnu, voire inconnu, du grand public. Quel argument à son propos avancerais-tu pour convaincre quelqu’un de s’y intéresser ?
C’est un championnat très intense, qui tend à se développer. Concernant Dudelange, c’est une équipe qui veut se donner les moyens de ses ambitions.
À titre personnel, on m’a vendu l’idée qu’on pouvait remporter des titres et jouer des barrages de coupe d’Europe. Cette simple idée m’a rendu fou, c’est une expérience géniale.
Quelles sont les principales différences que tu as pu noter entre le football français et le football luxembourgeois ?
Je pense que les principales différences résident dans les qualités techniques. La Ligue 1 c’est le très très haut niveau. Ça va vite, avec et sans le ballon, il y a de grosses individualités qui font la différence.
En National, c’est moins tactique, mais tout aussi technique. Les joueurs sont très bons balle au pied. Certains peuvent même prétendre à jouer aux échelons supérieurs.
Ici, ce qui m’a surpris, c’est l’intensité. Ce n’est pas forcément une chose à laquelle tu es préparé de prime abord, surtout quand tu viens de Ligue 1 ou de National. À ça, il faut ajouter qu’il y a également de nombreux talents individuels.
Et sur un plan tactique ?
Je ne trouve pas qu’il y ait beaucoup de différences, mais j’ai un coach qui est très bon tactiquement. Il a toujours un plan de jeu qui diffère en fonction de l’adversaire. Ça change quelque peu de ce que j’ai pu voir en France. Honnêtement, j’ai beaucoup progressé sur le plan tactique grâce à lui.
Que dirais-tu à un jeune joueur qui hésiterait à prendre son envol en dehors des grands pays de football européens ?
Je peux comprendre que ça puisse être pris comme un échec. Tu peux avoir des a priori ou être anxieux car tu es loin de ta famille. Mais ça te permet de t’ouvrir à d’autres cultures, de voir autre chose que ce à quoi tu es habitué.
Ça te permet aussi d’acquérir de l’expérience et, possiblement, de marquer les clubs par lesquels tu passes.
Pour ceux qui ne te connaitraient pas, quel type de joueur es-tu ?
Je suis un joueur offensif qui aime faire mal à l’adversaire, dans la profondeur comme balle au pied. J’aime apporter de l’explosivité à l’équipe, marquer et faire des passes décisives.
Si tu évolues principalement en position d’avant-centre, tu es également capable de jouer sur un côté. Mais quelle est la place qui te convient le mieux ?
Je me sens bien sur tous les postes du front offensif. À Caen, j’ai reçu une formation très complète qui m’a permis de m’adapter aux différentes demandes.
J’ai eu de très bons coachs qui m’ont aidé à me développer. Après, j’ai une petite préférence pour le rôle de faux 9 dans lequel je me sens plus libre.
Avec Dudelange, vous êtes actuellement en tête du championnat, un point devant votre principal concurrent, et avec la possibilité de rallier un tour préliminaire de Ligue des Champions. Au-delà du titre, qu’est ce que t’évoque l’opportunité de pouvoir avoir disputer cette compétition ?
C’est une compétition magique, particulière, avec ses émotions, sa musique… L’optique de pouvoir en jouer les barrages ne fait qu’augmenter ma motivation à terminer champion et avoir une chance d’y participer.
En tant que footballeur, quel est aujourd’hui ton plus grand rêve ?
De jouer au plus haut niveau et de gagner des trophées. Aujourd’hui, j’ai grandi et mûri, j’ai envie de jouer dans un top club et d’y laisser mon empreinte.
J’aime beaucoup le championnat espagnol, son jeu, son style. Et bien sûr le championnat anglais, même si je sais que c’est très physique, très intense. J’adore ça.
As-tu été inspiré par un joueur ?
Oui, par Neymar. C’est un joueur de grand talent, un offensif, comme moi, avec des qualités qui ne sont plus à démontrer.
Quel est le joueur le plus fort avec lequel tu as pu évoluer ?
Trois joueurs m’ont vraiment impressionné dans ma carrière : Fayçal Fajr, Brice Samba et Alexander Djiku.
Balle au pied, Fayçal est un joueur d’une beauté ahurissante. Quant à Brice, il est excellent, incroyable. Il prend tout l’espace dans les cages. Alex, pour sa part, est très très fort défensivement.
Quand je suis passé professionnel et que je les ai vu jouer, je me suis dis : « Waouh, c’est vraiment un autre niveau ».
Et le plus fort auquel tu aies été confronté ?
J’ai joué contre l’OL [J37, saison 2018-19, ndlr] et je me rappelle qu’il y avait Tanguy Ndombélé. Exceptionnel, un maestro.
Quand il décide que tu ne prendras pas le ballon, tu n’y arriveras pas. Techniquement, quand tu le presses trop, il te casse les reins. Et quand tu défends trop loin de lui, il parvient à trouver des passes qui cassent les lignes. Quand il te voit arriver et qu’il protège son ballon, il te montre que la balle est en sécurité [rires]. »