Il est parfois étonnant de constater à quel point il peut être rapide de passer du rêve au cauchemar – l’Union Berlin peut en témoigner. Ce samedi, face à l’Eintracht Francfort (0-3), les hommes d’Urs Fischer ont concédé leur douzième revers consécutif de la saison. Une nouvelle déconvenue qui, dans la plupart des clubs, aurait poussé la direction à se séparer de son entraîneur – et ce même si celui-ci avait connu cinq années de succès. Mais l’Union Berlin n’est pas un club comme les autres.
D’ailleurs, là où d’aucuns parleraient de crise, son président Dirk Zingler s’y refuse. « Le mot crise est un mot important. Si vous regardez le monde actuel, il semble difficile d’utiliser le mot crise en parlant d’un club de football, indiquait-il récemment à The Athletic. Nous ne sommes pas en crise lorsque nous perdons des matchs. Perdre des matchs appartient au football, ça arrive. Nous sommes en crise lorsque l’existence de l’Union est menacée, car notre objectif est de rassembler les gens, de leur offrir un foyer social. »
Une inefficacité criante
Si la direction du club berlinois n’estime donc pas que son équipe traverse, à proprement parler, une crise, elle ne peut tout de même pas ignorer la délicatesse de sa situation. Actuel 16e de Bundesliga, à un point de la lanterne rouge, le FC Cologne, l’Union Berlin a perdu le côté efficace qui le caractérisait l’an passé. Et ce dans les deux surfaces. En atteste notamment le nombre de buts déjà encaissé par les Hommes en Fer (22 après 10 journées), bien supérieur à celui de la saison dernière (6 après 10 journées). D’ailleurs réputés pour leur solidité, les Unionistes avaient – avec seulement 38 buts concédés – terminé l’exercice 2022-23 avec la co-meilleure défense du championnat (à égalité avec le Bayern Munich).
Mais l’arrière-garde n’est pas le seul secteur à faire défaut au club berlinois ces jours-ci. Particulièrement en vue la saison passée, Sheraldo Becker et Kevin Behrens connaissent eux aussi un passage à vide. Impliqué sur 27 des 51 buts inscrits (52,9%) par l’Union Berlin au terme des 34 journées de championnat, le duo offensif semble avoir perdu de sa majesté. Sheraldo Becker, auteur de 11 buts et de 7 passes décisives en Bundesliga l’an dernier, n’a pas encore trouvé le chemin des filets au quasi-tiers du championnat. De son côté, Kevin Behrens, signataire d’un triplé face à Mayence lors de la première journée, n’a plus été décisif depuis le 26 août. Une disette de presque trois mois qui pèse forcément sur les résultats de son équipe.
L’Union Berlin face à son manque d’expérience
Comment expliquer que cette équipe ait pu aussi rapidement s’embourber dans une situation aussi indélicate ? L’un des éléments de réponse se trouve peut-être dans son inexpérience. Quatrième de Bundesliga la saison dernière, l’Union Berlin doit désormais composer avec une nouvelle donnée : la Ligue des Champions. Six matchs – au minimum – de haut niveau et une exposition à grande échelle auxquels le club allemand n’a jamais été confronté dans son histoire. Car en plus de la charge physique qu’implique une telle compétition, son pendant psychique n’est pas à sous-évaluer. L’Union Berlin, en dépit de ses récents résultats, est aujourd’hui un club qui compte et qui est regardé.
La question qui se pose ensuite est de savoir si ce club, encore en deuxième division il y a cinq ans, est aujourd’hui armé pour la saison qui l’attend. Jouer tous les trois jours est évidemment différent de n’avoir à préparer qu’une seule rencontre par semaine. Une autre forme de gestion entre ainsi en ligne de compte. S’il peut être plus facile de parvenir à concerner l’intégralité de son effectif (en raison de la multiplication des matchs), savoir en satisfaire les égos est une mission autrement plus difficile, chacun voulant évidemment apparaître sous les projecteurs des rencontres les plus prestigieuses. Mais là aussi, tout n’est pas qu’une question de volonté. Et ça, la direction de l’Union l’a bien compris.
Raison pour laquelle Dirk Zingler et son département sportif ont tenu à renforcer l’équipe d’éléments d’expérience, notamment avec les arrivées de Robin Gosens, Lucas Tousart et, surtout, de Leonardo Bonucci. À lui seul, l’ancien défenseur de la Juventus Turin et international italien aux 121 sélections totalisait (avant le début de cette campagne) 84 apparitions en Ligue des Champions, soit quasiment la moitié du nombre total qu’en comptait l’entièreté du groupe d’Urs Fischer (170 matchs). D’ailleurs, sur les 21 joueurs utilisés par le Suisse depuis le coup d’envoi de la compétition étoilée, 11 n’y avaient jamais disputé la moindre minute. Un élément qui n’empêche cependant pas l’Union Berlin de faire bonne figure – au moins dans le jeu – dans un groupe relevé (Real Madrid, Naples, Braga). Mais à la fin, seuls les résultats compteront.
Un soutien indéfectible
Mais dans l’attente de jours meilleurs, tous, dirigeants comme supporters, ont décidé de faire front derrière Urs Fischer et ses hommes. « Vous devez être fiers de vous. Vous avez perdu 0-1 contre Naples qui n’a réussi à cadrer qu’un tir. Nous vivons un rêve en Ligue des Champions », rappelait ainsi le leader des ultras du club berlinois à l’issue de la rencontre face aux champions d’Italie en titre.
Un soutien sans faille que les pensionnaires de l’Alten Försterei partagent avec leur direction. « Vous avez besoin d’un entraîneur fort et intact, indépendant et capable de prendre ses propres décisions dans le vestiaire, affirmait Zingler à The Athletic. Si vous commencez à montrer une autre direction, cela devient une prophétie qui se réalise d’elle-même, car vous portez atteinte à votre propre entraîneur. La confiance mutuelle est la base du succès. C’est (Urs Fischer, NDLR) un très bon coach dans un club très stable. » Quant aux joueurs, malgré quelques incidents survenus ces dernières semaines laissant penser à une possible fracture en interne, tous sont investis de la mission à laquelle ils font désormais face : maintenir leur club en Bundesliga.
Eisern Union !